lundi 3 mai 2010

* COMITÉS DE SÉLECTION, PLAGIAT ET LES MYSTÈRES DE PARIS 8

NOUVELLE VERSION DU BLOG

http://archeologie-copier-coller.com/
* La lecture d'un précédent article, "Les pieds dans le plagiat", éclairera ceux qui s'interrogent sur le sens et la forme de notre démarche.
* Ce blog a été commenté, notamment par Michelle Bergadaà (Université de Genève,
cf. http://responsable.unige.ch), Hélène Maurel-Indart (Université de Tours, cf. http://www.leplagiat.net/) ou Sylvain Piron (EHESS, cf. http://evaluation.hypotheses.org/940).
* Interview paru le 18 mai 2010 dans le journal Libération : L'ampleur du plagiat, c'est ça la nouveauté.
Lire dans LeMonde.fr du 21 mai : Plagiat : la copie pointée à l'université.
et sur Swissinfo.ch, le 1er juin,
En Suisse comme en France, le plagiat ronge l’Université.

Textes mis en ligne le 4 mai 2010. Dernières modifications le 17 mai.
* Résumé des études précédentes et de ces 3 articles mis en ligne le 4 mai 2010:
Après avoir tenté en vain d'attirer l'attention de collègues sur des cas de mémoires-plagiat (DEA et Master), et après avoir constaté la contamination plagiaire vers les thèses, nous avons décidé d'ouvrir ce blog en décembre 2009.
Outre l'existence de plusieurs thèses-plagiat (
Retour au réel et Les pieds dans le plagiat), nous avons mis en évidence (Serials plagiaires [1]) que la délivrance du titre de Docteur avait été dans un cas accordé à un plagiaire alors que le directeur de recherche avait lui même co-signé deux articles avec des plagiats (Autopsie d'une thèse-plagiat, suite), plagiés par son doctorant plagiaire.
*
Le diplôme du "docteur" a donc été annulé par les instances de Paris 8, en même temps que les mêmes instances validaient la nomination de son directeur de recherche comme président d'un comité de sélection chargé du recrutement de nouveaux maîtres de conférences (Comités de sélection, plagiat et les mystères de Paris 8).
*
Parti d'une thèse de Paris 8, d'un plagiat l'autre, nous sommes conduit à une nouvelle thèse-plagiat soutenue cette fois à Nancy 2 (Nancy 2 : un cas de thèse-plagiat). Et voici que le directeur de recherche de cette thèse lorraine, membre du CNU, est invité à siéger à l'Université Paris 8 dans le comité de sélection présidé par le directeur de recherche de la thèse-plagiat dionysienne.

Ainsi va la ronde obstinée des plagiats.

* *
Note préalable :
Dans un commentaire, un collègue de Paris 8 se dit "mal à l'aise" vis-à-vis d'un aspect de ce blog : la publication de noms. Nous avons répondu (commentaire 6 de Serials Plagiaires [1]) et y reviendrons ultérieurement plus complètement.
Une précision cependant : "
thèse soutenue publiquement" est la mention d'usage sur la couverture des thèses, où sont à la fois mentionnés les noms de l'auteur et des membres du jury de soutenance. Il est de la nature d'une thèse d'être à la fois publique, commentée et critiquée. La déontologie universitaire impose de mentionner les auteurs des textes étudiés et cités. La démarche scientifique veut que quand on parle d'un texte on s'intéresse aussi à son contexte de production.

* * *

Cet article, publié le 4 mai 2010, est au centre d'un tryptique. Il est lié à deux volets mis simultanément en ligne : le volet droit, "NANCY 2 : UN CAS DE THÈSE-PLAGIAT" et le volet gauche, "AUTOPSIE D'UNE THÈSE-PLAGIAT, SUITE".

La campagne de recrutement 2010, actuellement en cours, des enseignants-chercheurs dans les universités (postes de maîtres de conférences et professeurs) est l'occasion d'aborder un des facteurs importants de la tolérance dont font preuve en France des universitaires vis-à-vis du plagiat : le plagiat par contamination, problème déjà évoqué par Philippe Quéau dans son commentaire à l'article "Les pieds dans le plagiat".


LA TOLÉRANCE AU PLAGIAT
Nous l'avons déjà souligné, aucun enseignant, nous en premier, ne peut se targuer de n'avoir jamais été abusé par des plagiats dans des travaux universitaires qu'il a eu à évaluer. Il convient donc d'être prudent chaque fois qu'il est question d'enseignants tolérants au plagiat (nous traiterons un jour du cas d'un mémoire de master -2004- dont nous avons été un des deux co-directeurs; de la découverte a posteriori et une fois le diplôme délivré de ses aspects "plagiat" et de nos efforts, jusqu'ici vains, pour faire annuler le diplôme).

Nous poserons que les universitaires "tolérants au plagiat" sont d'abord les enseignants qui sont eux-mêmes des plagiaires, ceux qui valident, par intérêt, complaisance ou simple paresse, des travaux qu'ils savent plagiés; ceux aussi qui dirigent des travaux si grossièrement plagiés qu'ils ont du faire un effort pour ne pas s'en rendre compte.
Les enseignants tolérants au plagiat sont aussi tous ceux qui le sont de manière passive : ceux qui excluent par principe d'entreprendre, dans le cas de mémoires et thèses qui s'avèrent à posteriori des travaux-plagiat
, une action d'annulation de diplômes. Ceci, même si ces mémoires et thèses ont été soutenus dans le cadre de master , laboratoires et écoles doctorales qu'ils dirigent, ou auxquels ils participent et où ils enseignent.

Faut-il encore distinguer, vis-à-vis du plagiat, entre le "silence complice" et le "silence contraint". Si on prend l'exemple du Laboratoire Paragraphe, on peut comprendre, sinon justifier, qu'un directeur de thèse sérieux ait pu se taire face à l'attitude d'autres collègues du même laboratoire vis-à-vis du plagiat. En effet, faire connaître cette attitude est immanquablement sources de dégâts collatéraux dont des doctorants, pourtant auteurs de thèses sérieuses, seront les victimes.
Ainsi, l'attitude de quelques enseignants aura malheureusement des conséquences néfastes sur le regard porté par le milieu universitaire sur les auteurs de toutes les thèses issues du Laboratoire Paragraphe.
Cette distinction entre silence complice et silence contraint vaut à l'échelle des laboratoires mais aussi à celle des écoles doctorales, et également à l'échelle des UFR et des directions des universités.
Le silence contraint est aussi celui de collègues très sincèrement indignés par le plagiat, mais qui se rendent compte que l'avenir de leur propre carrière universitaire peut dépendre, et parfois dépend totalement, de collègues tolérants au plagiat.

Le silence contraint est un effet très pervers de la situation créée par la tolérance au plagiat. D'autant que ce type de silence se transforme souvent au fil du temps en silence complice.

Par opposition, les universitaires intolérants au plagiat sont ceux qui ne plagient pas eux-mêmes; qui, informés d'un plagiat d'un de leurs propres étudiants ou de celui d'un étudiant agissant dans le cadre d'un diplôme où ils interviennent, ont gardé la capacité de s'en indigner, d'agir afin que le plagiaire ne puisse bénéficier de sa fraude au détriment de ceux qui rédigent leur travaux sans plagier.

Il est difficile d'être à la fois tolérant et intolérant au plagiat. Un précédent article mis en ligne sur ce blog, "
Les pieds dans le plagiat", a montré que les enseignants titulaires du département Hypermédia de l'Université Paris 8 étaient, dans leur majorité, tolérants au plagiat; certains très activement, d'autres, les plus nombreux, par leur seul silence, complice ou contraint.


LES COMITÉS DE SÉLECTION ET LA TOLÉRANCE AU PLAGIAT
Que se passe-t-il quand des enseignants tolérants au plagiat siègent dans des comités de sélection ?
L'universitaire plagiaire sera conduit à favoriser le recrutement d'un nouvel enseignant au minimum "tolérant au plagiat", il en va de sa propre protection. Ce raisonnement vaut aussi pour les enseignants
"tolérants au plagiat", même passivement.
La cooptation qui régit la constitution des "collèges de spécialistes" et "des comités de sélection" facilite le regroupement dans certains comités, à l'initiative des plus "tolérants", de noyaux quasi-structurés d'enseignants "tolérants au plagiat".

Pour palier les cuisines trop indigestes, la loi a prévu qu'une fois le comité de sélection formé et après qu'il ait proposé un président, sa composition doit être ratifiée par le Président de l'université, le Conseil scientifique et en dernière instance par le Conseil d'administration de l'université où le comité de sélection doit siéger.
Si l'on considère que certains des enseignants "tolérants au plagiat" siègent aussi dans ces instances, cette mesure se révèle-t-elle suffisante pour garantir la qualité et l'intégrité des comités de sélection ?


LES MYSTÈRES DE PARIS 8

Le mystère à résoudre est celui-ci : comment un universitaire, alors qu'il est connu et prouvé qu'il a dirigé et validé une thèse-plagiat, par ailleurs annulée par le Conseil scientifique, peut-il se retrouver présider, avec le plein accord du même Conseil scientifique et du Conseil d'administration de Paris 8, un comité de sélection destiné à étudier les dossiers des candidats dans le cadre du recrutement 2010 des Professeurs et Maître de conférences ?

Nous mettrons en regard deux calendriers. Le premier est celui de la connaissance par les instances de l'Université Paris 8 de l'existence de thèses-plagiat
et donc par voie de conséquence la connaissance des directeurs de recherche et des membres des jury associés à ces thèses. Le second calendrier est celui des dernières décisions des différentes instances de Paris 8 concernant la nomination finale des membres et des présidents des comités de sélection chargés du recrutement 2010 des maîtres de conférences et professeurs à Paris 8.

Le calendrier plagiat :
Informé par courrier et par mail, le 18 janvier 2010 de l'existence, sans plus de détails, de
thèses-plagiat soutenues à Paris 8 et d'une demande de rendez-vous à ce propos, le Président de l'Université a fait suivre ces courriers à la Vice-présidente du Conseil scientifique.
Quelques jours plus tard, surpris de l'absence de réponse, nous informons de ces cas deux collègues mieux placés que nous pour rentrer en contact avec la Vice-présidente
et la convaincre que le problème était sérieux.
Finalement cette dernière
a pris contact avec nous le dimanche 31 janvier. Elle disposera le même jour d'un de nos documents de travail, un fichier où sont détaillés les plagiats repérés de la thèse de Majed Sanan, dirigée par Kaldoun Zreik.
Ce document mettait en évidence les plagiats repérés de cette thèse, avec tous les moyens (adresses internet) d'en consulter les sources pour vérification. À cette date, déjà plus de 65% de la thèse étaient documentés comme plagiat (de nouveaux plagiats documentés depuis permettent d'évaluer aujourd'hui ce taux à plus de 90%).
La Vice-présidente
convoque en urgence les responsables des écoles doctorales et des représentants du Conseil scientifique et du Conseil d'administration à une réunion le 4 février. Il y est procédé à la rédaction d'un communiqué sur le plagiat qui sera publié le 10 février dans le journal de l'Université et sur ce blog.

Le 11 février, parmi les points à l'ordre du jour d'une réunion du Conseil scientifique figure la création d'une Commission de déontologie chargée de traiter ces problèmes de plagiat. Le même conseil traitera aussi le sujet des comités de sélection en cours de désignation.
Concernant le premier point, on lira dans le compte rendu des délibérations de ce conseil (c'est nous qui soulignons en gras) :
QUESTION DES PLAGIATS.
Saisi à propos de cas de plagiats et de copié-collé dans des Masters et dans des thèses de doctorat au sein de l’université, le Conseil scientifique entend prendre des mesures rapides et rigoureuses, il rappelle qu’il est de la responsabilité des directeurs et co-directeurs de thèse d’assurer la vérification de l’originalité des textes produits. Il est également possible d’envisager des sanctions (conseil de discipline, suspension de la fonction de directeur de thèse...).

Le CS met en place une Commission de déontologie, et propose la composition suivante :
les trois Vice Président(e)s les directeurs des Écoles doctorales. deux membres du bureau du CS.
(...)
Avis favorable à l’unanimité
On remarquera que l'évocation et la menace d'une éventuelle "suspension de la fonction de directeur de thèse" ne peut dans ce contexte précis que viser Kaldoun Zreik, directeur de la thèse-plagiat de Majed Sanan dont les membres du Conseil scientifique de Paris 8 connaissent alors, à cette date, déjà parfaitement la vraie nature.
Point confirmé lors d'une réunion que nous avons eu le 2 mars 2010 avec les responsables de la nouvelle Commission de déontologie créée le 11 février, les Vice-présidents des trois conseils centraux (
Conseil scientifique, Conseil d'administration et CEVU).
À cette occasion, la Vice-présidente du CS
, pour illustrer la volonté du conseil de déontologie de "prendre des mesures rapides et rigoureuses", a donné lecture des conclusions du rapporteur de la commission chargé d'étudier la thèse de Majed Sanan. Le rapporteur insistait sur son indignation et prônait non seulement l'annulation du diplôme dans les meilleurs délais mais aussi la transmission du dossier au CNU, et proposait la déqualification du directeur de recherche, Kaldoun Zreik, à diriger de nouvelles thèses; un avis d'ailleurs en phase avec la décision déjà envisagée dans le communiqué du 11 février (voir ci-dessus).


Le calendrier de la désignation des comités de sélection :
La même réunion du Conseil scientifique du 11 février est aussi l'occasion de traiter d'un problème lié au Comité de sélection du département Cinéma de Paris 8. Le relevé des délibérations à ce propos est intéressant en ce qu'il expose en pleine lumière le pouvoir discrétionnaire du Conseil scientifique en matière de désignation des membres des comités de sélection chargés du recrutement 2010 :
COMITE DE SELECTION DU DEPARTEMENT DE CINEMA
Soucieux de l'avenir de la recherche en cinéma, le Conseil scientifique demande instamment que les deux collègues (professeurs des universités) recrutés dans le département Cinéma en 2009 soient membres du Comité de sélection et se réserve la possibilité d'intervenir sur la composition nominative dudit Comité.
Il charge la Vice-présidente du CS de communiquer aux collègues concernés les principes souhaités par le CS quant au périmètre et à la composition du Comité de sélection.
Si ces principes n'étaient pas respectés, il demande que la Présidence et le Conseil d'administration soutiennent et relayent ces demandes qui lui paraissent à même de sauvegarder l'avenir de la recherche en cinéma à Paris8.
Avis favorable à l’unanimité

Cet extrait des délibérations atteste sans la moindre ambiguïté qu'aucune nomination dans les comités de sélection ne se fait sans l'aval conjugué du CS, du CA et de la Présidence.
Le calendrier lié à la désignation des comités de sélection, et annoncé par l'université, était le suivant :
- 19 février au plus tard transmission au président de la liste des comités et des présidents

- 25 février : réunion du CS restreint avis sur les propositions du président relatives à la désignation des membres des comités de sélection.

- 26 février réunion du CA restreint : vote sur les propositions du président relatives à la désignation des membres et des présidents des comités de sélection.
Signalons aussi un Conseil d'adminisration le 5 mars avec "le dispositif anti-plagiat" à l'ordre du jour et un autre CA, le 19 mars, qui se penche sur un "Projet de procès-verbal de constatation de fraude aux examens".

On comprend donc d'autant plus mal que déjà informé, au moins depuis le 11 février, de la nature de la thèse de Majed Sanan
, les membres du Conseil d'administration informés comme ils l'étaient "et soucieux de l'avenir...", ait choisi Khaldoun Zreik pour présider le comité de sélection de la 71e section du CNU chargé du recrutement d'un Maître de conférence (poste n° 748).

La nomination de
Khaldoun Zreik comme Président de ce comité de sélection n'est pas la seule surprise que réserve la consultation de la liste des membres de ces commissions pour l'Université Paris 8 : Khaldoun Zreik a aussi été nommé à une autre commission de la 71e section, pour le recrutement d'un Maître de conférences sur le poste "0188".

Que cette nomination ait été faite, sous le contrôle et avec le plein accord du Conseil scientifique et du Conseil d'administration dont les 2 Vice-présidentes
sont aussi responsables de la Commission de déontologie créée le 11 février pour lutter contre le plagiat, laisse sceptique sur la volonté d'agir ou l'efficacité de cette Commission dite de "déontologie".


COMITÉS DE SÉLECTION (71e SECTION) : L'INVITÉ

Notre travail sur le plagiat dans les travaux universitaires est parti de l'analyse de travaux produits au sein du département
Hypermédia de l'Université Paris 8, et notamment des thèses rédigées au sein du Laboratoire Paragraphe, laboratoire de recherche né de ce département.
Nous avons déjà eu l'occasion d'écrire que nous évaluons à la moitié la part des thèses soutenues du Laboratoire Paragraphe ces dernières années et qui n'auraient pas du l'être, à s'en tenir au seul critère de la présence de plagiats dans ces thèses.

Voici comment une de ces thèses du Laboratoire Paragraphe, soutenue en 2004, conduit, après un détour par
Nancy, aux comités de sélection 2010 de la 71e section de Paris 8 :
La thèse "
Recherche collaborative d'informations : repenser l'architecture des SRIs àl'ère numérique", dirigée par Imad Saleh, a été soutenue à Paris 8 en 2004. Elle fait partie de ces thèses du Laboratoire Paragraphe où la part du plagiat (en l'espèce des copier-coller et des paraphrases serviles), très loin d'atteindre les taux records que l'on connaîtra plus tard, aurait du cependant, en l'état, conduire à suspendre la soutenance.
Le plus curieux de cette thèse est que, via ses propres plagiats, elle nous a directement conduit à une autre
thèse-plagiat soutenue fin 2007 à l'Université Nancy 2.
Une nouvelle fois, signe indiscutable de l'ampleur des plagiats dans les travaux universitaires, nous avons rencontré la figure du plagiat de plagiat.

Dans cette
thèse-plagiat de Nancy 2, "Proposition d'une méthodologie d'indexation d'images d'œuvres architecturales, à partir des besoins des décideurs : Propriétaire, Architectes, Constructeurs et Administrateurs", "rédigée" par Marie-France Ango Obiang, l'assemblage de plagiats n'est pas très difficile à repérer pour un lecteur un tant soi peu attentif.
Cette thèse de Nancy 2, tissu de "
copier-coller", accorde la meilleure place aux copier-coller tirés de la thèse dirigée à Paris 8, par Imad Saleh et soutenue en 2004. Un des deux articles qui accompagnent celui-ci, "NANCY 2 : UN CAS DE THÈSE-PLAGIAT" en offre une analyse.

Au jury de soutenance de cette
thèse-plagiat lorraine (mention honorable), outre A. David, le directeur de thèse, participaient M. Hassoun, rapporteur, P. Sanson, rapporteur, et L.-P. Laprévote, examinateur.
Les lecteurs de ce blog auront noté que M.
Hassoun sera moins d'un an plus tard, en octobre 2008, le rapporteur de la thèse-plagiat de Majed Sanan (mention très honorable), dirigée par Khaldoun Zreik et soutenue à Paris 8 avec Imad Saleh dans le jury.


La
prédilection de Marie-France Ango Obiang pour plagier une thèse de Paris 8 (elle même avec des plagiats) afin de "rédiger" sa thèse, puis le choix à Nancy 2 comme à Paris 8 de M. Hassoun comme rapporteur de thèses-plagiat n'épuisent pas les coïncidences fortuites.

En effet,
Amos David, directeur de recherche de la thèse de Nancy-2, a été invité le 26 mars 2010 à se joindre comme rapporteur au jury de soutenance d'une thèse dirigée par Imad Saleh (École doctorale Cognition, langage et interaction dont I. Saleh est Directeur-adjoint).
Amos David
a aussi été coopté comme premier membre externe des trois comités de sélection en 2010 de la 71e section de Paris 8 chargés du recrutement, notamment celui présidé par Khaldoun Zreik.
Son statut de membre du Comité National des Universités de la 71e section (dans ce cas, membre nommé par le Ministère des universités et de la recherche) vaut d'ailleurs à A. David
d'occuper une place éminente dans ces comités et de figurer en tête des membres externes sur les listes des trois comités de sélection de la 71e section.

Sur la base des seules observations déjà faites, cette question se pose :
Khaldoun Zreik (1) comme président, et Amos David comme membre extérieur, l'un et l'autre directeurs de thèses essentiellement composées de plagiats sont-ils vraiment les mieux désignés pour diriger l'examen des dossiers, lire, apprécier et évaluer les travaux des candidats aux nouveaux postes de maîtres de conférences et professeurs ?

Pourtant, on peut être certain que l'avis de
Khaldoun Zreik sera déterminant pour le choix du candidat. Il suffit pour s'en convaincre de lire certains éléments du profil du poste de Maître de conférences (N° 748) mis au concours devant le comité de sélection présidé par K. Zreik, et avec A. David membre du CNU de la 71e section.
2) Recherche :
Laboratoire(s) d'accueil : Paragraphe (EA 349)
Nom du directeur du laboratoire Paragraphe : Imad Saleh
La personne recrutée effectuera ses recherches dans l’axe CITU/Paragraphe, responsable de l’équipe : Khaldoun Zreik
Le candidat rejoindra le laboratoire Paragraphe et participera à la recherche en sciences de l’information et de la communication, dans les champs de l’hypermédia (...)

AUTRES QUESTIONS :
Vues les conditions de constitution de ces comités de sélection, les candidats écartés ne seront-ils pas fondés à contester le résultat des délibérations qui leur auront été défavorables et à demander une nouvelle étude de leur dossier par des comités de sélection plus raisonnablement constitués ?

Ces candidats refusés
pourront-ils contester ces résultats devant le CNU de la 71e section, avec toutes les garanties d'un traitement équitable, alors que parmi ceux dont la compétence à siéger dans ces comités de sélection serait susceptible d'être mise en cause, figure un des représentants du Ministère des universités et de la recherche à ce même CNU de la 71e section ?

Surtout, par quel mystère le Conseil scientifique et le Conseil d'administration de Paris 8 ont-ils pu choisir
Khaldoun Zreik pour présider un des 3 comités de sélection de la 71e section (et aussi le désigner pour participer à un deuxième comité) ?
Ceci, au moment même où ces mêmes conseils prenaient la décision, exceptionnelle et courageuse, d'annuler le diplôme associée à la thèse-plagiat qu'il avait dirigée; et alors que ces conseils et la Commission déontologie avaient envisagé de demander "la suspension de sa fonction de directeur de thèse".

Pour que les choses soient parfaites, d'autres collègues en rapport avec des thèses-plagiat participent à ces comités de sélection. En effet, le Conseil scientifique et le Conseil d'administration connaissaient naturellement depuis le 11 février les autres enseignants de Paris 8 qui avaient participé de manière si déplorable aux jurys de soutenance de deux
thèses-plagiat. Leur rigueur et compétence à lire et juger les travaux universitaires, si bien démontrées à l'occasion de ces deux soutenances, leur permettra d'intégrer les commissions de sélection chargées du recrutement 2010.

-
Imad Saleh, membre du jury aveugle de la thèse de Majed Sanan, participe à deux comités de sélection de la 71 e section (poste de Professeur n° 965 et une commission avec K. Zreik, pour le poste de Maître de conférence 0188).

- Gilles Bernard, membre du Conseil d'administration de Paris 8, ancien Vice-président, et président du jury de la
thèse-plagiat de Sang Ha Suh (avec les félicitations du jury) a sa place dans le comité de sélection de la 27e section (informatique) pour le recrutement sur un poste de professeur (n° 900).

Ce n'est pas tout, Guy Chapouillé
qui était venu de l'Université de Toulouse pour offrir les félicitations à Sang Ha Suh pour sa thèse-plagiat est à nouveau invité à Paris 8 pour siéger à la commission de sélection de la 18e section (Arts et technologie de l'image virtuelle, poste n° 640).

Comment en est-on arrivé là ?
Nous ne pouvons imaginer qu'aucun des membres de la Commission de déontologie, ou du Conseil scientifique, ou encore du Conseil d'administration n'ait soulevé le problème de la composition un peu baroque de certains des comités de sélection 2010 de Paris 8.
- Quelle a été la réponse faite à ceux qui s'étonnaient du choix d'un directeur de recherche d'une thèse-plagiat comme Président d'un comité de sélection ?
- Quelle a été la position des membres du CNU de la 71e section ? Il est en effet exclu que le CNU n'ait pas été informé depuis février de l'existence de thèses-plagiat à Paris 8 validées par des enseignants de la 71e ?

Jean-Noël Darde

* * *
Note : (1)
Nous avions, dès le début du mois de mars, évoqué devant la Vice-présidente du Conseil scientifique de Paris 8 une hypothèse selon laquelle la nature plagiaire de la thèse de Majed Sanan pouvait, en partie, avoir été connue de son propre directeur de recherche avant même la soutenance. Nous disposions déjà de quelques éléments qui nous permettaient de l'envisager. Cette question est posée à la fin de l'article précédent, SERIALS PLAGIAIRES [1].
L'article "AUTOPSIE D'UNE THÈSE-PLAGIAT, SUITE" fournit à ce sujet d'autres informations à partir desquels le lecteur établira sa propre conviction. Il y est démontré
que deux articles, co-signés Majed Sanan, Mahmoud Rammal et Khaldoun Zreik, que M. Sanan a plagiés pour sa thèse sont eux-mêmes des articles qui intègrent beaucoup de plagiats.

Jean-Noël Darde
MC - Université Paris 8

* * *

2 commentaires:

Anonymous Didier Delignières a dit...

Le plagiat devient en effet un problème majeur dans le monde universitaire, notamment avec le développement l’internet. J’ai été moi-même interpellé au sujet d’une affaire dont j’ai rendu compte dans un éditorial de la revue Science et Motricité dont je suis Editeur Principal. On pourra retrouver cet éditorial sur le site de la revue (http://www.cairn.info/revue-science-et-motricite-2009-2.htm), ou sur mon blog (http://didier.delignieres.over-blog.com/article-le-plagiat-dans-l-edition-scientifique-50625135.html). Je retrace ici les grandes lignes de l’affaire.

L’article en cause a été publié en 2008 dans la Revue des Sciences Humaines de l’Université Mohamed Khider de Biskra (Algérie), dans son numéro 15 (pp. 27-41). L’article s’intitule «Approche Sociologique de la Pratique d'Activité Physique et Sportive chez les Adolescents », et l’auteur en est le Dr Amar Rouab, enseignant dans cette université.

Une simple recherche de fragments de phrases de l’article sur Google m’a rapidement permis de voir que cet article était un plagiat grossier de plusieurs textes, accessibles sur internet. L'introduction de l'article (pages 28 et 29) est la simple copie de textes parus sur le site du ministère algérien délégué chargé de la Famille et de la Condition Féminine. L'article le plus pillé a été publié en 2004 sur le site du département Education et Motricité de l’UFR STAPS de Montpellier. Il s'agit d'un cours de Mr Jalabert, enseignant à la Faculté des Sciences du Sport de Montpellier, intitulé « Adolescence et EPS ». Les pages 30 à 38 sont la copie conforme du texte mis en ligne sur le site de Montpellier. Enfin la conclusion de l’article du Dr Rouab (pages 38-41) est la copie d'un texte du docteur Michel Binder, mis en ligne sur le site Vo-Thuat.net consacré aux arts martiaux vietnamiens. L'ensemble de l'article n'est qu'une vulgaire copie, le pillage intellectuel de travaux dont les auteurs ne sont même pas cités. Il n’y a guère que le résumé de l’article que l’on puisse supposer être de la main de l’auteur.

J’ai évidemment contacté le Dr Rouab. Il reconnaît avoir fait une faute en n’ayant pas pris le soin de citer le site ministériel où il avait « pris l’introduction », et affirme concernant son plus gros emprunt : « je ne pouvais pas deviner que cette partie appartenait en réalité au Professeur Olivier Jalabert, je vous prie donc de m’en excuser ». On pourra vérifier sur le site de l’université de Montpellier si un doute était possible à ce niveau…

Le professeur Brahim Mezerdi, Vice-Recteur chargé de la recherche, m’a assuré que ce problème recevra toute son attention et que ce genre de comportement ne doit en aucun cas être toléré. Il m’informe de l’ouverture d’une enquête, en collaboration avec le rédacteur en chef de la revue et les reviewers ayant expertisé l'article. Plus aucune nouvelles depuis. L’affaire semble oubliée.

Le plagiat est un comportement intellectuel méprisable. Mais lorsqu’il reçoit la caution implicite des autorités universitaires et des instances éditoriales, cela devient insupportable. Même si ces articles ne sont pas publiés dans des revues internationales prestigieuses, ils sont essentiels dans les processus de promotions au sein des universités. Les enseignants-chercheurs honnêtes, travaillant dans des conditions difficiles, font évidemment les frais de ces comportements lamentables.


Didier Delignières
Directeur de l'UFR STAPS de l'Université Montpellier I
Editeur Principal de la revue Science et Motricité

18 mai 2010 à 01:20  
Anonymous Maïeul ROUQUETTE a dit...

Bonjour,

je suis tombé sur votre site via votre interrogatoire sur LeMonde.fr

autant dire qu'il est extrêment intéressant.

Vous parlez beaucoup des différents type de plagiats, que je peux résumé, si j'ai bien suivi en 3 variantes :
- plagiat "copier-coller"
- plagiat "traduction"
- plagiat "paraphrase"

Si vous parlez des méthodes de détection des deux premiers, vous ne parlez pas du troisième cas. J'imagine que c'est le plus difficile.

En dehors de l'analyse stylistique, voyez vous un moyen de détecter ce type de plagiat ?

cordialement

10 novembre 2010 à 10:52  

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